Ladysmith est une étape commode sur la route du Nord, le long de l’île de Vancouver. Nous y étions venus l’an dernier, et déjà, nous avions remarqué ces lapins semi-sauvages qui faisaient leur vie le long de l’autoroute. Nouveauté : cette année, ils sont jaunes. Que sont devenus les précédents ?… Pourtant, le plus nouveau, c’est que les martinets noirs résistent à la disparition…
Je m’intéresse à eux parce que, comme nous finalement, ils sont menacés d’extinction, et en attendant, ils viennent dans la région au printemps, vivent quelques mois dans les marinas, et repartent quand arrivent les mauvais jours. Mais surtout, leur présence ici est remarquable.
Les Purple Martin (en français “hirondelles noires) sont les plus grands exemplaires de la famille des hirondelles présents sur le continent nord-américain.
Ils viennt du Brésil au printemps. En Colombie britannique, c’est un peu la limite Nord de leur été américain. Ici, étant peu nombreux, leurs colonies sont fragiles. Il suffit d’une vague de froid (inférieure à 6°C), ou d’une période de pluie inhabituelle, pour qu’ils ne trouvent plus assez d’insectes pour nourrir leurs petits, et les couvées de l’année sont perdues. Et naturellement, les insecticides ont eu leur part dans leur raréfaction.
Pour enrayer leur disparition totale, la Colombie britannique a lancé, au début des années 80, un un programme d’installation de boîtes-nids, près des habitations humaines, protégées des oiseaux prédateurs par des entrées étroites et des grillages. Des plans ont été diffusés pour les bricoleurs, des conseils prodigués pour l’installation des boîtes, des encouragements donnés aux marinas. L’espèce est passée, dans la région, de quelques couples seulement à une une centaine aujourd’hui. Tous, sauf un, logent dans l’une des ces boites.
Plus largement, le programme a couvert de vastes régions d’Amérique du Nord, après que le livre de Rachel Carson “Silent Spring” (1960) a attiré l’attention sur la destruction des insectes et des oiseaux par les pesticides. On dit qu’il y a maintenant plus d’un million de boîtes en Amérique du Nord.
Quel plaisir aujourd’hui, quelle inspiration aussi, cette cohabitation entre hommes et oiseaux ! Mais quel exemple rare ! On n’entend parler que de baleines empoisonnées au plastique, de “Killer Whales” harcelées de touristes en pneumatiques, de biodiversité en berne.
Nous ne sommes pas très fiers de venir profiter de cette nature en lui faisant partager nos fumées de diesel. Au moins essayons-nous d’être discrets et modestes. Quel sens cela a-t-il de venir ici dans des yachts de plusieurs millions de dollars, et trop grands même pour être accueillis dans les marinas familiales qui sont la règle ici ?
Bon, je ne vais quand même pas me donner en exemple de conscience écologique et de cohabitation avec la faune sauvage : cette nuit, réveillé par le bruit de petits pas sur le pont, j’ai chassé un racoon avant qu’il n’attaque notre corbeille de fruits laissée dehors. Il est reparti clopin clopant sur les pontons, vexé d’avoir raté cette occasion…